Maria (Français) - страница 3



Alors que nous croisons un groupe d'esclaves, mon père s'adresse à un jeune homme noir d'une stature remarquable :

Alors, Bruno, votre mariage est-il prêt pour après-demain ?

Oui, mon maître, répondit-il en ôtant son chapeau de roseau et en s'appuyant sur le manche de sa bêche.

–Qui sont les parrains et marraines ?

–Je serai avec Dolores et M. Anselmo, s'il vous plaît.

–Eh bien, Remigia et toi serez bien confessés. Remigia et vous serez bien confessés. Avez-vous acheté tout ce dont vous aviez besoin pour elle et pour vous avec l'argent que j'ai envoyé pour vous ?

–C'est fait, mon maître.

–Et c'est tout ce que vous voulez ?

–Vous verrez.

–La pièce que Higinio vous a indiquée, c'est bien ?

–Oui, mon maître.

–Oh, je sais. Ce que vous voulez, c'est de la danse.

Bruno rit alors, montrant ses dents d'une blancheur éblouissante, et se tourne vers ses compagnons.

–C'est bien ; vous vous conduisez très bien. Vous savez, ajouta-t-il en se tournant vers Higinio, arrangez cela, et rendez-les heureux.

–Et ils partent en premier ? -demande Bruno.

Non, répondis-je, nous sommes invités.

Le samedi matin suivant, à l'aube, Bruno et Remigia se sont mariés. Ce soir-là, à sept heures, mon père et moi sommes montés à cheval pour aller au bal, dont nous commencions à peine à entendre la musique. Lorsque nous sommes arrivés, Julian, le capitaine esclave de la bande, est sorti pour nous mettre le pied à l'étrier et recevoir nos chevaux. Il était vêtu de son costume du dimanche et portait à la taille la longue machette plaquée d'argent qui était l'insigne de son emploi. Une pièce de notre ancienne maison d'habitation avait été vidée des biens de travail qu'elle contenait, afin d'y organiser le bal. Un lustre en bois, suspendu à l'un des chevrons, faisait tourner une demi-douzaine de lumières : les musiciens et les chanteurs, un mélange d'agrégés, d'esclaves et de manumissionnaires, occupaient l'une des portes. Il n'y avait que deux flûtes de roseau, un tambour improvisé, deux alfandoques et un tambourin ; mais les voix fines des negritos entonnaient les bambucos avec une telle maîtrise ; il y avait dans leurs chants une combinaison si sincère d'accords mélancoliques, joyeux et légers ; les vers qu'ils chantaient étaient si tendrement simples, que le dilettante le plus instruit aurait écouté en extase cette musique à demi sauvage. Nous sommes entrés dans la salle avec nos chapeaux et nos bonnets. Remigia et Bruno dansaient à ce moment-là : elle, vêtue d'un follao de boléros bleus, d'un tumbadillo à fleurs rouges, d'une chemise blanche brodée de noir, d'un collier et de boucles d'oreilles en verre rubis, dansait avec toute la douceur et la grâce que l'on pouvait attendre de sa stature de cimbrador. Bruno, avec ses ruanes enfilées repliées sur les épaules, sa culotte de couverture aux couleurs vives, sa chemise blanche aplatie et un nouveau cabiblanco autour de la taille, tapait du pied avec une admirable dextérité.

Après cette main, qui est le nom que les paysans donnent à chaque morceau de danse, les musiciens jouèrent leur plus beau bambuco, car Julien leur annonça que c'était pour le maître. Remigia, encouragée par son mari et par le capitaine, se résolut enfin à danser quelques instants avec mon père ; mais alors elle n'osait plus lever les yeux, et ses mouvements dans la danse étaient moins spontanés. Au bout d'une heure, nous nous retirâmes.