Contes de l'empire Primorskoie tsarstvo - страница 3
– Eh bien, répond Ivan, je veux juste galoper avec toi à travers champs.
– Mais, Ivanouchka, as-tu une selle qui puisse m'aller?
– Comment veux-tu que j'aie une selle! Mes frères ne me laissent pas approcher de l'écurie, – répondit Ivan.
Le cheval frappa la terre de son sabot et disparut. Mais une seconde plus tard il était déjà revenu.
Sa selle et sa bride étaient cousues d'or et ornées de pierres précieuses. Les yeux ne pouvaient se détacher de tant de beauté. Et par dessus la selle un somptueux vêtement avait été posé. Ivan ôta ses vieux vêtements, se lava à la rivière, revêtit l'habit que le cheval lui apportait et devint un superbe jeune homme. Il sauta en selle et Zlatibor s'élança gracieusement. Le cheval enchanté ne semblait pas courir, mais voler dans l'air. Les ravines étaient franchies d'un bond léger, et les bouleaux dépassés en un seul élan. Ivan n'avait pas eu le temps de reprendre son souffle que la capitale fut en vue. Ivan regarde à grands yeux et aperçoit dans un vaste pré une jeune fille chevauchant sur un beau coursier bai. Oh que cette apparition lui semble belle et le ravit! Sa beauté, il est vrai, a immédiatement conquis Ivan. Il vole vers elle et lui demande:
– Qui es-tu, si belle damoiselle, et pourquoi cavales-tu ainsi seule dans la campagne?
– Je suis Elena Agaphonovna et je sors mon cheval dans le champ qui appartient à mon père, le tsar Agaphon! Mais toi, qui es-tu? Et de quel droit me poses-tu des questions? Peut-être me faut-il appeler les gardes pour t'interroger à ce sujet?
Ivan comprit qu'il avait devant lui la fille du tsar. Mais comme elle lui plaisait infiniment, il décida d'engager plus loin la conversation. Il retira son bonnet et dit à la belle:
– Pardonne-moi Elena Prekrasnaia. Je ne voulais surtout pas t'offenser, je n'avais d'autre idée qu'admirer ta beauté, j'ignorais que tu étais la fille de notre tsar!
Le beau jeune homme plût à Elena Prekrasnaia. Il était à la fois bien fait de sa personne et tenait des propos fort courtois. De mot en mot, leurs paroles se donnèrent le change. Tout le reste du jour ils chevauchèrent côte à côte dans les champs et ils ne se séparèrent qu'au soir venu. Elena Prekrasnaia rentra au palais, Ivan de son côté retrouva ses vieux habits, se salit comme il faut avant de revenir chez lui.
Et dès lors, il en fut toujours ainsi. Tous les matins, Ivan s'en vint attendre sur son cheval enchanté que la tsarine sortit du palais. A longueur de journées, ils chevauchaient ensemble et devisaient sur mille choses. Ils ne remarquèrent même pas qu'ils étaient épris l'un de l'autre. La tsarine voulait tout savoir d'Ivan, d'où il était, où se trouvait sa maison, or Ivan avait honte d'avouer quel Ivanouchka-L'imbécile il était en réalité et comment il passait sa vie assis près du poêle à ramasser les cendres. Alors la tsarine eut recours à la ruse. Le tsar Agaphon possédait un sceau royal, et il ne s'agissait pas d'un sceau banal mais d'un sceau enchanté. Il permettait à qui s'en servait d'apposer son emblème n'importe où, et pas n'importe comment, mais en lettres d'or. Elena subtilisa le sceau impérial en cachette et s'en vint trouver Ivanouchka. Sans qu'il le sache, elle réussit à lui imprimer le sceau d'or sur la main gauche. Le soir venu, Ivan s'aperçut de cette marque étincelante. Il la couvrit de boue et se cacha près du poêle. La tsarine le matin suivant partit de village en village escortée de soldats. En arrivant dans chaque village, elle passe en revue les mains gauches de tous les hommes dans l'espoir d'y découvrir le signe d'or. Elle arrive finalement au village d'Ivanouchka-L'imbécile. Mais elle a inspecté les mains de chacun sans trouver trace du sceau.